Portrait famille Drappier
Crédit Photo : Champagne Drappier

Maison Drappier, l’art de l’innovation en Champagne

La Champagne n’est pas une belle endormie. Elle sait que le changement climatique est là. Son vignoble subit depuis quelques années des épisodes extrêmes, gels, pluies diluviennes, grêles, fortes chaleurs, qui vont en s’amplifiant et s’accélérant. Elle s’adapte et anticipe les bouleversements à venir. Elle a également conscience d’une évolution des souhaits de ses clients, vers plus de naturalité, d’authenticité.

Consciente dès les années 80 de ces enjeux climatiques, la maison de Champagne Drappier a pressenti les nouvelles tendances de consommation. Elle innove depuis plus de 40 ans, dans les vignes et au chai, et illustre ainsi le dynamisme de ce haut lieu viticole français, qu’est la Champagne. Nous nous sommes entretenus avec Hugo Drappier, l’un des héritiers de la maison éponyme. 

Champagne Drappier
Crédit Photo : Champagne Drappier

Une famille visionnaire en Champagne

Drappier est une maison familiale située en Côte des Bar, dirigée par Sylvie et Michel Drappier. Ils ont été rejoints en 2016 par la 8è génération, Charline, Antoine et Hugo. Innovation et vision avant-gardiste constituent l’ADN du domaine. 

Mon père a en effet initié un grand virage dans les années 80, au niveau de la vinification”, précise Hugo. Il poursuit : “intolérant au soufre, il a choisi de limiter drastiquement les intrants. Il a baissé les doses de soufre de manière importante, il a même été le premier à le supprimer sur certaines cuvées (Brut Nature Sans Soufre). Il a également élaboré des cuvées non dosées (Brut Nature) et a banni collage et filtration”. Michel Drappier souhaitait ainsi laisser le vin et son terroir s’exprimer librement. Une vision très novatrice pour l’époque!

La Maison Drappier ne s’arrête pas là. Après ce travail au niveau de la vinification, Michel s’est attelé à la viticulture, par souci de cohérence. Il a souhaité ainsi bannir l’usage des produits phytosanitaires. Pour produire des vins qui sont l’expression de leur terroir, il savait que les vignes devaient être conduites de la manière la plus propre possible. Il a alors commencé dès les années 90 à convertir en bio le domaine, parcelles après parcelles. 

Ce travail de longue haleine s’est traduit par une mise sur le marché des premières bouteilles labellisées bio en 2019 (cuvées Clarevallis et Quattuor). “Aujourd’hui, 100% de nos vignes cultivées en propre sont en bio, dont 50% sont déjà certifiées. Nous visons 100% de nos parcelles y compris les fermages d’ici à 10 ans”, précise Hugo.

Vignes Drappier
Crédit Photo : Champagne Drappier

Cépages en Champagne et changement climatique

Chardonnay, Pinot Noir, Pinot Meunier sont les cépages emblématiques de la Champagne, qui en recense d’autres, moins connus, moins cultivés. La Maison Drappier a perçu très tôt l’importance de la diversité des cépages. 

Mon arrière grand-père était visionnaire, il a été le premier à ré introduire le Pinot Noir en Champagne entre les deux guerres. Mon père a, quant à lui, remis au goût du jour dès les années 2000 trois cépages champenois anciens, le Fromenteau, l’Arbane et le Petit Meslier, et a re pensé le Blanc Vrai”, précise Hugo. 

Ces cépages à maturité tardive sont très intéressants dans le cadre du réchauffement du climat et sont à présent l’objet de nombreuses attentions et réflexions dans la région. 

Promouvoir des cépages anciens participe en outre à introduire de la diversité, dans un contexte global de standardisation des goûts. Plusieurs cuvées de la maison Drappier témoignent de la richesse organoleptique de ces cépages oubliés, Clarevallis, Quattuor ou encore Trop M’En Faut, une cuvée 100% Fromenteau, qui permet aux amateurs de retrouver les notes de Champagne d’autrefois, riches et exotiques. 

Vignes Drappier à perte de vue
Crédit Photo : Champagne Drappier

Un Champagne au carbone neutre

Drappier est depuis 2016 le premier domaine en France à être “Carbone Neutre”. 

A tel point que des confrères viennent prendre conseil sur cette démarche”, raconte Hugo, qui poursuit : “nous avons tout simplement anticipé une obligation en Champagne, initiée par le CIVC, de réduire l’empreinte carbone de 25% à horizon 2025 et de 75% à horizon 2050. Cette démarche allait de soi, nous travaillons depuis les années 90 à la certification bio, il était naturel de travailler à la neutralité carbone, qui vient couronner notre démarche et notre engagement.

Entrepôt Campagne Drappier
Crédit Photo : Champagne Drappier

Le goût du Champagne bio

Une question se pose, légitime, et qui fait débat : quels sont les impacts du bio au niveau du goût des cuvées? Pour Hugo, cela ne fait aucun doute : “en supprimant au maximum les intrants, en bannissant collage et filtration dès les années 80, puis en prenant le virage d’une agriculture respectueuse dans les années 90, nous avons constaté que nos cuvées gagnaient chaque fois plus de pureté. Car la chimie au niveau des vignes écrasent le vin.

En effet, lorsque l’on travaille le sol de manière naturelle, par l’enherbement ou les labours, les racines des vignes s’enfoncent plus profondément, vers la roche mère. Les mycorhizes, ces champignons qui vivent sur les racines et qui sont essentiels aux échanges entre le sol et la vigne, sont vivaces en bio (alors qu’elles disparaissent sous l’action des produits phytosanitaires) : les vins gagnent en minéralité et en acidité, en fraîcheur.

La maison Drappier prend par ailleurs soin de vendanger les raisins avec de belles maturités aromatiques, elle peut donc réduire également de manière drastique le dosage en sucre lors du dégorgement, process initié par le père d’Hugo dès les années 80. 

Limitation des intrants, dosages allégés voire supprimés, raisins avec de belles maturités et gorgés de minéralité avec de belles acidités grâce à une culture durable de la vigne, tout cela concourt à des cuvées qui expriment la pureté de leurs terroirs. Une viticulture durable et une vinification peu intrusive permettent de garder l’énergie de chaque cuvée, dont l’aboutissement est le travail sur les parcellaires, qui permet de retrouver l’expression unique de chaque terroir. 

Ainsi, la Grande Sendrée est parmi les premières cuvées parcellaires en Champagne. Née en 1974, il existait seulement 3 ou 4 parcellaires à l’époque. “Là encore, mon père a été visionnaire, en anticipant le désir de terroir des consommateurs” renchérit Hugo. Une cuvée avant-gardiste, à en juger par la multiplication en Champagne des cuvées parcellaires depuis quelques années.

Paysage de vignes
Crédit Photo : Pascal Xicluna – agriculture.gouv.fr

Champagne et gastronomie végétale

Ne limitez plus le Champagne à l’apéritif ! La diversité des cuvées appelle la diversité des accords et Drappier en est un fabuleux exemple, qui saura accompagner vos mets issus de gastronomie végétale, de l’entrée au dessert. La pureté et la fraîcheur du Brut Nature Sans Soufre se marient magnifiquement avec les saveurs marines et iodées d’un tartare d’algues. Cette cuvée accompagne aussi avantageusement une coupelle de groseilles rouges et groseilles à maquereau, aux notes vives et acidulées.

Champagne et cuisine végétale
Crédit photo : Rachel Claire

Pour un délicat carpaccio de légumes et fruits d’été, agrémenté de fleurs, pensez à l’extra brut Clarevallis, floral, printanier et aérien. Quant aux notes fraîches d’agrumes de la cuvée Quattuor, Blanc de Blanc extra brut, elles font merveille avec les sorbets ou granités au citron, pamplemousse, mandarine. 

Merci à Hugo Drappier.

En savoir plus :

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Découvrir le travail de Sophie Roulé sur son site Involuté – Vins et évènements et sur Instagram

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