Besoins et sentiments dans la gastronomie végétale

Au fil de mes enquêtes, de mes rencontres, de mes recherches, j’ai pu observer et analyser la situation, et faire un état des lieux de ce qui se passe dans le monde de la gastronomie traditionnelle lorsqu’il s’agit de cuisine vegan.

Le besoin des Chefs

Aujourd’hui, la réalité est que les grands Chefs n’expriment aucun besoin en terme de cuisine végétale. Pour la plupart, ils ne proposent pas de menu vegan à leur carte et s’en accomodent très bien.

Certains affirment qu’ils ne veulent pas faire autrement, pour des raisons pratiques et économiques. Certains assument le fait qu’ils ne savent tout simplement pas faire, faute de formation ou de connaissances en la matière.

D’autres savent faire, sont curieux et osent proposer des nouveautés 100% végétales. Mais alors qu’ils ont fait le plus gros du travail, ils résistent à communiquer ou n’affichent pas clairement leur offre, créant un peu de confusion auprès des clients.

D’autres encore, après avoir proposé une offre claire et assumée, se retirent discrètement au bout d’un temps.

Ces inégalités reflètent l’état d’esprit de ces Chefs qui sont perdus face à cette nouvelle gastronomie. Or, tant que les Chefs seront perdus, les clients le seront aussi.

Du côté des Chefs vegan, c’est tout autre chose. Ils sont autodidactes, ont beaucoup pratiqué la cuisine végétalienne, ils ont de l’avance sur ce sujet et ont appris de nouvelles techniques pour donner à la cuisine traditionnelle son alternative végétale.

Ce qu’ils font est bon, beau et en ligne avec la gastronomie “à la française”. C’est innovant et ça plaît à un nombre croissant de personnes.

Alors que les connaissances et compétences de chacun pourraient être réunies pour réfléchir aux défis de demain, les Chefs traditionnels et les Chefs vegans travaillent encore trop chacun dans leur coin et ne s’associent pas suffisamment pour apprendre les uns des autres.

Aujourd’hui en effet, les grands Chefs n’expriment pas ce besoin, mais il est important de l’anticiper car il est pourtant bel et bien là.

Le sentiment des Chefs

Quand le sujet du végétal est abordé, le sentiment des Chefs varie également.

Pour les Chefs qui ne s’y intéressent pas vraiment, ils sont plutôt bien dans leur coin. Dans ce cas, il est tout de même important de leur montrer ce que cela leur apporterait de s’y intéresser. Les amener à voir les choses autrement pour faire évoluer leur métier en apprenant de nouvelles techniques, de nouveaux savoirs…

Pour les Chefs qui sont conscients du sujet mais qui doutent encore, ils auraient certainement besoin de savoir par où commencer. Dans ce cas, il suffirait de les mettre en lien avec les bonnes personnes, de les accompagner avec des pairs rassurants pour amorçer doucement le sujet.

En ce qui concerne les Chefs vegans, beaucoup travaillent principalement en BtoC (Business to Consumer) et n’ont pas encore forcément l’occasion d’être au contact des grands Chefs. Il serait cependant important pour eux d’aller davantage à la rencontre de ces grands Chefs et leur parler de la façon dont ils exercent le métier. S’exposer et se rendre visible, pour montrer et donner le goût de ce qu’ils font. Susciter du sentiment…

Le rôle des Chefs

Le métier de Chef est loin d’être simple. Aujourd’hui un Chef se doit d’être passionné, créatif, tout en étant chef d’entreprise, gérant, communiquant… Tous n’ont évidemment pas les moyens d’être tout cela à la fois. Mais ce métier amène à s’adapter et à se questionner tout au long de la vie et au gré des changements de notre société, car manger est une nécessité et qu’on ne peut fermer les yeux sur l’impact de notre façon de s’alimenter aujourd’hui.

Alors que nous nous interrogeons sur l’avenir de l’alimentation humaine d’ici à 2050, le végétal est très certainement l’une des solutions. Le véganisme n’est pas une mode ni une tendance mais une vraie philosophie de vie qui questionne notre façon de consommer et de manger. Un levier qui pourrait s’avérer précieux pour ces Chefs qui s’interrogent.

Les grands Chefs sont les garants de la gastronomie française, à même de passer les bons messages au grand public, c’est donc à travers eux que le changement alimentaire est possible. Ils ont un rôle de pédagogie vis-à-vis du grand public, mais encore faut-il qu’ils connaissent suffisamment bien le sujet et qu’ils veuillent s’approprier ce rôle.

De quoi avons-nous peur ?

Quand il s’agit de faire du neuf, de changer les choses… les craintes sont nombreuses. Sortir de sa zone de confort nous pousse à remettre en question notre pouvoir de maîtrise et de contrôle, et c’est tout à fait inconfortable. Nos peurs de l’échec, du changement de repères… nous poussent à rester dans nos certitudes sans se poser de questions.

Mais n’est-ce pas plus enrichissant pour soi et pour les autres, d’apprendre à faire les choses différemment ? Oser pousser de nouvelles portes et accepter que l’on puisse se tromper.

Alors pourquoi ne pas tout simplement essayer. Le seul risque que j’y vois est que cela fonctionne au-delà de nos espérances et que nous devenions (enfin) les vrais acteurs de la gastronomie de demain.

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